J'en avais rêvé, CAP Vercors l'a fait !
Le tour du canton des 4 montagnes par les sentiers, un truc un peu fou qui avait germé chez l'amoureuse du Vercors que je suis, à l'époque où le trail ne s'appelait pas ainsi, ça n'avait pas de nom d'ailleurs, on courait sur les sentiers, un point c'est tout !
Alors voilà, en cette année 2014, très franchement je ne voulais pas refaire d'ultra, d'abord parce que je reprenais après 1 année de pause sans savoir ce que ça donnerait, et puis aussi parce qu'après 8 années à se coller 1 voire 2 ultra(s) par an dans le cornet, je commençais à saturer de ces distances sur lesquelles j'avais fini par trouver mes limites perso.
Sauf que, sauf que... quand on m'a proposé un dossard sur l'Ultra Trail du Vercors, et bien... j'ai craqué, j'ai dit oui !
Déjà une invit', ça ne se refuse pas et moi je suis une fille polie ;-)
De plus, comment ne pas céder à l'envie de faire le tour du massif où j'ai grandi, là où se trouvent les sentiers de mes 1ères foulées, lorsque la page de ma vie de patineuse s'était fermée pour en démarrer une autre...
Enfin l'esprit de cette course correspond à ce que j'aime dans ce sport, pas de tapage médiatique, pas de stars qui se la pètent et de ligne élite, juste une super journée de trail organisée par des passionnés et partagée avec la petite troupe de potes que j'ai recrutée dans le 7.4 : Marianne, François, Aurore, Stéph !
Jour J : j'ai retrouvé l'excitation de mes 1ers ultras, je pars dans l'inconnu car, malgré l'expérience accumulée au cours des saisons, je ne sais plus comment je dois gérer la distance (88 km/4500D+ mais qui feront en fait 91 km/5000D+), je ne sais pas de quoi je suis capable, je n'ai plus de repères...
So exciting !!!
Bertrand m'emmène au départ où l'on retrouve les G.O Aurélie, Denise, Béné et tant d'autres.
Petit clin d'oeil sympa pour les filles du parcours solo : nous sommes toutes appelées pour nous mettre en 1ère ligne, une fois n'est pas coutume !
C'est parti à la lueur des frontales, comme j'aime !
Irina, dont le palmarès est inversement proportionnel à la taille, et une autre coureuse,Caroline, partent devant.
J'hésite : partir pépère ou essayer de les suivre ? Allez, je suis d'humeur joueuse, de toute façon au pire j'explose en cours de route, y a pas mort d'homme, ça n'est jamais que du sport !
Je fais connaissance avec Irina et Caroline au fil des km, Irina est déjà impressionnante sur les montées, et ce n'est que le début.
A l'approche de Valchevrière, ce petit village qui fut détruit par les Allemands, je ne peux m'empêcher d'avoir un petit coup au coeur : c'est dans la petite chapelle retapée au milieu des ruines que j'ai été baptisée il y a... un certain temps
J'y croise Patrick qui y est signaleur et qui hallucine de m'entendre faire la visite guidée à Irina !
Bon enfin la guide va rapidement se faire larguer justement, Irina s'envole dans la montée suivante de sa petite foulée légère alors que tout le monde marche.
Le jour commence à pointer et nous traversons la forêt du domaine nordique, là où j'ai appris à skier, entre piste forestière, clairières brumeuses à l'ambiance envoûtante et singles ludiques en sous-bois jusqu'au 1er ravito et pointage : Corrençon (24 km, 02:35).
Bertrand s'occupe gentiment de ma poche pendant que je vire le gilet sans manches et troque le buff contre la casquette... et que Caroline repasse devant.
Je la reprends tranquillement au train sur la longue section roulante suivante vers le golf, puis la pente se corse en sortie de forêt et nous voici dans le vif du sujet : la montée bien raide à la Tête des Chaudières, dont les falaises calcaires s'illuminent avec le lever du soleil : magnifique !
J'ai la patate, je monte bien, sans être dans le rouge et je rattrape pas mal de monde.
Je prends le temps sur la crête d'admirer le superbe panorama qui nous est offert, tous ces massifs, Belledonne, Taillefer, Chartreuse... qui nous entourent et le mythique Mont Aiguille qui garde un oeil sur nous, petites fourmis des crêtes !
Pendant ce temps ça redescend un peu puis ça remonte vers la petite Moucherolle où nous retrouvons l'empreinte de l'homme avec le domaine skiable de Villard.
J'attrape des abricots secs au petit ravito qui s'y trouve, car... j'ai la DALLE !
Et oui, la machine à calories est en route, Grossebouffe a faim... (ça faisait longtemps).
La descente jusqu'au ravito et pointage de la Côte 2000 est longue et pas très fun mais je sais qu'il était difficile de l'éviter vu les contraintes de passage auxquelles l'orga a dû se plier.
C'est là que le 1er avion de chasse des relais à 2, partis 1h après nous, me croque ! Puis le 2e en la personne de mon pote Sam !

Côte 2000, 41 km, 05:12 : Irina est partie depuis plusieurs minutes déjà, ça s'annonce difficile de recoller. Pas grave, je me gère en fonction de mes capacités maintenant.
Ravito formule 1 grâce à tous les potes présents ainsi que Maman, trop d'la balle !
Et zou en avant guingamps pour rejoindre mon patelin à 16 km de là.
Je rattrape quelques rares coureurs sur cette portion mais me retrouve pas mal seule globalement, je sors l'iPod pour passer un peu le temps, Banks et Ziggy Marley dans les oreilles c'est top.
Passage aux Allières, le spot que j'adore depuis toujours, et ça descend raide sur Lans. Les quadri chauffent, bon ça fume pas encore mais je sens sur cette descente qu'ils ne sont pas de la toute première fraîcheur...
Hum, pas génial pour la suite ça.
Lans, 57 km, 07:15 : je retrouve un échantillon de ma dream team avec mes parents, Lou et Sacha qui me presse de repartir, allez maman faut que tu rattrapes Irina !
Les enfants sont formidables :-)
Pas trop envie de manger malgré mon estomac qui en aurait bien besoin. Seuls les quartiers d'orange et des bouts de banane me font envie.
La fusée Sam puis mon frangin m'encouragent un peu plus loin, juste avant que je vive mon grand moment de solitude dans la montée pourtant superbe entre l'école d'escalade et les Jeux.
Bon faut dire que c'est midi, soleil de plomb et le bide brassé, bref pas super le tableau. Je peine à monter, j'ai plus de forces, je dois m'arrêter régulièrement.
Je me change les idées en plaisantant avec les bénévoles au niveau de la main courante, mais je suis vraiment dans le dur de dur.
Je croise Ben qui redescend rendre son dossard, au bord du malaise...
Allez gamberge pas, faut que t'avances, je me dis !
C'est à partir de là que je sors mon super joker, totalement régressif et totalement inefficace sur le plan énergétique mais tant pis, je les veux tout de suite et maintenant : mes Haribo nom de dieu !!!
Effet placebo et/ou remontée éphémère de la glycémie, toujours est-il que je me sors progressivement de mon marasme pour reprendre le dessus.
Je double pas mal de solos sur la large piste du Moucherotte, non pas que je cours comme un cabri, mais je marche façon nordic walking, vite et fort.
Le Moucherotte : là encore je prends 2' pour profiter de la vue panoramique, je la connais par coeur et pourtant impossible de s'en lasser.
Hop une poignée de réglisses fourrés dans le cornet et j'attaque ma descente... aïe, ouille, aïe !
Purée mes cuisses !!! Rendez-moi mon déambulateur bordel !
Une descente dans un style peu académique donc, d'autant plus qu'elle est technique et j'aurais bien besoin de toutes mes cuisses pour avoir de bons appuis... Une autre fois Ginette !
St Nizier, 68 km, 09:22 : oh yes ma dream team est là, c'est bon de les retrouver ! Aurore qui a fait son 1er relais est là aussi, maman et elle s'occupent de moi pendant que je ravitaille, quel luxe !
Je prends des nouvelles de Marianne, Nico et Delphine (relayeuse d'Aurore) avant de repartir.
Je sais désormais que, sauf accident, je ne reviendrai pas sur Irina, qui a vraiment pris le large.
Et avec le mal aux cuisses que je me tape, ma mission va être de ne pas trop ralentir.
Je repars à petite foulée rasante de mémère pour le pas du Curé qui plonge sur Engins. J'adore ce passage, trop joli !
La dernière grosse difficulté se dresse devant moi, la remontée jusqu'au pas du Tracollet, au dessus de l'alpage de la Molière, toujours nourrie aux Haribo et au jus de raisin dilué.
La montée est assez longue mais heureusement à l'ombre, j'ai retrouvé un peu de peps (ben ouais je suis tombée sur un dragibus dans mon sachet, c'est la fête) et j'aperçois Bertrand qui est maintenant signaleur au Tracollet.

Difficile de relancer ensuite sur la crête tellement j'ai les cuisses plombées.
Je me dis qu'il me manque sûrement une course de prépa de 45-50 bornes, car il semble que le volume enquillé sur les sentiers pour le boulot n'ait pas été suffisant.
Bascule dans la combe pour rejoindre Autrans et bis repetita : aïe, ouille !
Allez, plus tu cours, plus vite tu arrives ! C'est la seule pensée qui arrivera à me faire trottiner malgré la douleur.
Autrans, 84 km, 11:58 : ultime ravito où je retrouve ma famille, bô papa, et aussi une amie que je n'ai pas vue depuis des années et qui m'y attend !
Super les retrouvailles, imaginez un peu elle doit prendre dans les bras une meuf qui marine dans sa transpiration depuis 12h, qui a des moucherons collés dans le cou (petit complément protéiné au cas où) et qui ne pense qu'à bouffer des bonbecs :-)
Plus glamour tu meurs !
Allez on se donne RV à Méaudre, à 7 km de là après l'ultime bossounette du parcours où j'ai pas mal la patate, je cours autant que possible, j'ai toujours mal mais j'ai hâte d'en terminer !
Comme d'hab je me suis trouvée une petite carotte pour bien terminer : moins de 13h et sans me faire rattraper par Nico (relais à 2) qui n'est pas loin !
Le clocher de Méaudre est à quelques centaines de mètres, je débouche dans le village, la foulée se fait un peu moins rasante, le sourire est vissé sur les lèvres, mes amis, ma famille sont là, je savoure !

Je passe sous l'arche en 12:58 (91 km), et qui arrive 30'' après ??? Mon beau Nico, plein de sueur et de moucherons lui aussi !!!
On mélange nos moucherons dans un bisou gluant :-D
Irina est arrivée depuis belle lurette et ma 1ère pensée est de la féliciter pour sa prouesse, c'est une sacrée championne, humble et super sympa.
Pfffiouuu, c'est bien crevant ces ultras quand même hein !
Beaucoup de plaisir sur la 1ère moitié, et un peu moins sur la 2e : plus très envie de me battre contre ces coups de barre monumentaux typiques de l'ultra qui s'abattent sur vous sans crier gare, comme je le pressentais depuis que j'ai remis le dossard cette année.
Le bonheur de courir dans le Vercors m'a en revanche poussée jusqu'au bout, tout comme l'ambiance qui existe sur cette course, le fair play et les encouragements mutuels entre solos et relayeurs, ainsi que le sentiment d'avoir couru cet UTV en équipe avec ma famille et mes amis, avec lesquels on va s'envoyer bières, pizzas et mojitos à the place to be dans le Vercors Nord : le Camp de Base à Lans en Vercors !
Merci et bravo aux potes du 7.4 et d'ailleurs venus découvrir cette belle course... (photos Bertrand, Badgone)

Merci à ma famille, un soutien sans faille qui compte beaucoup...
Bravo à CAP Vercors et tous les bénévoles, tant qu'une course comme l'UTV existera, les valeurs simples du trail perdureront !
Si vous me cherchez à l'UTV 2015, ce sera dans les relais, parce que l'utra et moi, ça y est, c'est game over :-)
Vertacouette